EXTRAITS SUR L'EXIL
"Un ou deux ans après avoir quitté la Bohême, elle se trouva tout à fait par hasard à Paris le jour anniversaire de l'invasion russe. Une manifestation de protestation avait lieu ce jour-là . De jeunes Français levaient le poing et hurlaient des mots d'ordre contre l'impérialisme soviétique. Ces mots d'ordre lui plaisaient, mais elle constata avec surprise qu'elle était incapable de crier de concert avec les autres. Elle ne put rester que quelques minutes dans le cortège." "Elle fit part de cette expérience à des amis français. Ils s'étonnaient : « Tu ne veux donc pas lutter contre l'occupation de ton pays ? » Elle voulait leur dire que le communisme, le fascisme, toutes les occupations et toutes les invasions dissimulent un mal plus fondamental et plus universel ; l'image de ce mal, c'était le cortège de gens qui défilent en levant le bras et en criant les mêmes syllabes à l'unisson. Mais elle savait qu'elle ne pourrait pas le leur expliquer. Elle se sentit gênée et préféra changer de sujet."
"Celui qui veut quitter le lieu où il vit n'est pas heureux."
"Qui vit à l'étranger marche dans un espace vide au dessus de la terre sans le filet de protection qui tend à tout être humain le pays qui est son propre pays où il a sa famille , ses collègues , ses amis et où il se fait comprendre sans peine dans la langue qu'il connait depuis son enfance."
"Elle pensait alors que l’univers communiste était le seul où régnait cette barbarie de la musique. A l’étranger, elle constate que la transformation de la musique en bruit est un processus planétaire qui fait entrer l’humanité dans la phase historique de la laideur totale. Le caractère total de la laideur s’est d’abord manifesté par l’omniprésence laideur acoustique : les voitures, les motos, les guitares électriques, les marteaux piqueurs, les hauts parleurs, les sirènes. L’omniprésence présence de la laideur visuelle ne tardera pas à suivre."